L’éducation égyptienne à la dérive
Alors que l’Égypte vient de passer le cap des 100 millions d’habitants, son éducation est loin de suivre le rythme. Avec un budget très inférieur à celui alloué à l’armement et des classes frôlant les 100 élèves, l’Égypte échoue pour l’instant à faire face au défi de sa démographie galopante.
L’éducation égyptienne entre manque de moyens et corruption
Près de dix après la révolution de 2011, l’Éducation en Égypte n’a guère profité du bouleversement politique. Les priorités sont clairement affichées en 2020, avec 90 milliards alloués au budget militaire, soit trois fois plus que le budget de l’Éducation. Selon le classement du Forum économique mondial, l’Égypte arrive dans les dernières places des 137 nations étudiées : 133e pour l’éducation primaire et secondaire, et 130e pour l’enseignement supérieur. Ce résultat n’a rien de surprenant au vu de la situation dans les établissements, avec des classes pouvant atteindre 80 à 100 élèves dans les quartiers les plus pauvres. Un tiers des élèves sortent ainsi de l’école primaire sans savoir lire ou écrire. En 2017, plus de 18 millions de personnes étaient illettrées en Égypte.
Même si l’accès à l’éducation est théoriquement gratuit en Égypte, dans les fais l’espoir d’une réussite a un coût. Les très faibles salaires des enseignants incitent nombre d’entre eux à organiser des cours privés après l’école, seule réelle chance pour les parents de voir leurs élèves progresser – et pour les enseignants d’élever un tant soit peu leur niveau de vie. Cette pratique désormais courante représente presque la moitié des dépenses parentales, du moins pour les familles susceptibles de supporter ce coût officieux. Les conséquences sont évidentes, avec une vaste partie de la population égyptienne incapable de faire face à ces dépenses, et des enfants très tôt déscolarisés.
Le défi de l’éducation égyptienne face à la démographie
Si l’éducation relève toute sauf de la priorité en Égypte, la réalité démographique du pays aurait pourtant de quoi largement alarmer les autorités. Contrairement au déclin du nombre de naissances par femme observé dans plusieurs pays africains et du Moyen-Orient (Tunisie, Iran…), la population égyptienne ne cesse de croître à une vitesse vertigineuse, avec 2 millions de personnes en plus tous les ans. Le cap des 100 millions d’Égyptiens vient ainsi d’être franchi, alors même que l’École n’arrive plus à faire face depuis longtemps, et que la situation économique du pays n’invite guère à l’optimisme.
De manière ironique, si ce n’est tragique, le système officieux mais généralisé des cours payants dans l’enseignement renoue avec une pratique développée dans l’Égypte antique, il y a plus de 4 000 ans de cela. L’accès à l’Éducation était déjà réservé aux couches aisées de la population, incluant les fonctionnaires et le clergé. Les enfants de l’élite pouvaient ainsi soit se rendre à l’école, soit à la “Maison de Vie”, une institution liée à un lieu de culte. L’enseignement dispensé pouvait permettre aux élèves de prétendre à des métiers prestigieux comme astronome, architecte, théologien, médecin ou encore vétérinaire.