Brésil : la chasse aux enseignants “marxistes”

Publié le 24/08/2020 à 12:20
Brésil : la chasse aux enseignants “marxistes”

Dans le flot des problèmes inondant le Brésil, il en est un moins médiatique que l’extrême violence endémique ou l’actuel coronavirus. C’est celui de l’éducation, en proie à une mise au pas par le gouvernement d’extrême-droite. Une véritable chasse aux enseignants supposés “marxistes” s’y déroule, de même qu’aux disciplines considérées comme “inutiles”. 

 

 

Une éducation nationaliste

 

Depuis l’arrivée au pouvoir du gouvernement Bolsonaro en janvier 2019, l’Éducation nationale fait figure de cheval de bataille. La nomination du ministre de l’Éducation, Ricardo Vélez Rodríguez (limogé quelques mois plus tard), a immédiatement donné le ton. Anticommuniste convaincu, Rodríguez souhaitait revenir à la sanglante dictature militaire des années 1960 à 1980, en obligeant les élèves à chanter l’hymne brésilien ponctué du slogan “Le Brésil au-dessus de tout“, rappelant l’hymne national allemand des années 1930. Son successeur Abraham Weintraub n’a guère changé de ligne directrice en déclarant la guerre au “marxisme culturel” et en s’attaquant aux filières littéraires, jugées infestées, avant d’être contraint de démissionner à la suite d’une procédure judiciaire pour racisme.

 

Sur fond de nationalisme et de christianisme exacerbés, une véritable mise au pas l’Éducation s’est mise en place, s’attachant à démonter le déjà médiocre héritage de l’ex-président Lula. L’offensive passe par la révision des programmes, avec l’effacement de toute référence à l’expression de dictature militaire”, et à des coupes budgétaires drastiques, impactant les matières considérées comme non rentables, telles la sociologie et la philosophie. L’accent est davantage porté sur des disciplines pragmatiques, comme la médecine et l’ingénierie. L’enseignement à domicile, économique, est par ailleurs encouragé, de même que l’éducation dans les établissements militaires, réceptacles tous désignés pour mettre en oeuvre le nationalisme gouvernemental.

 

 

La guerre aux enseignants “marxistes”

 

Le gouvernement en a fait un véritable combat : les enseignants “marxistes”, ce terme vague désignant toute personne un tant soit peu orientée vers la gauche de l’échiquier politique. Considérés comme des “ennemis de la patrie”, ces derniers sont ouvertement persécutés, avec un appel publique à la délation. Les enseignants vivent ainsi avec une véritable épée de Damoclès pesant sur leur tête, renforcée par les réseaux sociaux où même les étudiants et les parents peuvent s’en donner à cœur joie. Des méthodes rappelant sans grande imagination les années dictatoriales du Brésil.

 

Le résultat de cette politique est évident, avec une démoralisation croissante des enseignants les plus républicains, et la tentation de l’exil. Par ailleurs les coupes budgétaires ciblant les établissements en ligne de mire se font aux bénéfices des groupes d’enseignement privés conservateurs et catholiques. Le niveau des élèves, déjà peu élevé avant l’arrivée du gouvernement Bolsanoro, devrait probablement empirer lors du prochain test international Pisa, où le Brésil figure parmi les derniers pays de l’Amérique latine.

 

 

 


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